Enseignant-Chercheur
Comment êtes-vous devenu enseignant à l’ensa•m ?
Par hasard.
En 1971 les premières utilisations de l’informatique appliquée à l’architecture ont nécessité de faire appel à des intervenants compétents dans ce domaine, afin d’aider les étudiants de troisième cycle de l’École d’architecture à maîtriser les outils informatiques alors assez rébarbatifs.
La participation aux travaux de recherche du gamsau dès 1972, m’a permis de prendre conscience que l’application des nouvelles technologies à l’architecture et l’urbanisme correspondait plus à mon attente que le côté purement théorique de mon domaine.
La richesse des coopérations inter-disciplinaires existant alors à l’école, ainsi que sur le campus, le développement des premiers outils de CAO auquel j’ai pu participer, les coopérations internationales que nous avons développées, les réflexions sur la nature de ce que devait être l’application des nouvelles techniques à l’architecture m’ont permis d’évoluer dans le champ STA, de chef de travaux pratique à professeur titulaire.
Je considère cette rencontre fortuite avec l’architecture, comme l’un des éléments qui a profondément structuré ma vie, par la richesse du domaine architectural et culturel, par les échanges et débats tant au sein de l’école qu’avec l’ensemble du milieu universitaire, enfin par l’échange avec les étudiants.
Quelles actions et projets d’enseignement avez-vous développé à l’ensa•m ? Dans quel contexte ?
Mise en place des enseignements informatique depuis 1974.
Participation aux réformes pédagogiques successives,
Participation à la CPR et au conseil d’administration,
Participation aux cycles de formation continue.
Participation à diverses commissions nationales en tant que membre nommé ou élu, notamment nommé membre de la commission nationale d’habilitation des CEAA (Certificats d’Etudes Approfondies en Architecture) puis élu au CSSEA (Conseil Scientifique Supérieur de l’enseignement de l’architecture) .
Participation à des coopérations internationales, en particulier avec Faculté d’Architecture de l’Université des Sciences Techniques et Économiques de Budapest (de 1994 à 1999) puis avec la Faculté
d’Architecture de l’Université de Belgrano à Buenos Aires (de 1996 à 2011).
Mise en oeuvre d’une coopération pédagogique avec Imagina de 1993 à 1998.
Mise en oeuvre d’une coopération avec le Festival Européen de la Jeune Création Numérique
Co-création d’un CEA (certificat d’étude approfondie) architecture et nouvelles technologies,
Création d’une option Architecture dans le DESS Compétence Complémentaire en Informatique avec la Faculté de Luminy, puis d’un master sur le même thème.
Réalisation (en partenariat avec Jean Lucien Bonillo) de CD-Rom, de sites web et de bornes interactives avec les enseignants Didier Dalbera, Isabelle Fasse, et Frédérique Bertrand et les étudiants du DESS puis du master CCI (Compétence Complémentaire en Informatique), sur le patrimoine architectural pour le Conseil général des Alpes maritimes :
La baie de Roquebrune Cap-Martin, E1027 le cabanon et le camping du Corbusier, l’Étoile de mer. L’Observatoire de Nice.
L’ensemble portuaire de la baie de Villefranche de 1600 à nos jours.
La Villa Arson.
Le Comté de Nice.
Marcel Breuer, le centre de recherche IBM à la Gaude.
Trois oeuvres de Paul Quintrand.
Comment êtes-vous devenu chercheur à l’ensa•m ? Dans quel(s) laboratoire(s) ? ?
Par conviction.
La rencontre avec l’enseignement des Sciences et Techniques appliquées à l’architecture, et le dynamisme insufflé par les créateurs du gamsau, m’ont très rapidement convaincu que, pour enseigner une discipline en constante évolution telle qu’était l’informatique dans les années 70, il était indispensable de mener de front enseignement et recherche.
La possibilité offerte par le gamsau de participer à une réflexion sur la spécificité de l’application des nouvelles technologies à l’architecture et l’urbanisme, le partenariat engagé alors entre le gamsau et le laboratoire LISH (Laboratoire d’Informatique pour les Sciences de l’Homme) m’ont permis de m’intégrer à une recherche naissante et de l’appliquer au travers de l’enseignement dans l’aide apportée aux étudiants de troisième cycle, en particulier dans l’élaboration et la réalisation d’outils adaptés à leur approche.
Quelles actions et projets de recherche avez-vous développé à l’ensa•m ? Dans quel contexte ?
De 1972 à 1980 participation à la conception et au développement d’un système de CAO « système 72 » spécifique à l’architecture en partenariat avec l’école des Mines de Fontainebleau et la société ERMAInformatique composée d’architectes. Ce développement ne put aller à son terme, mais aboutit à la réalisation d’un logiciel de CAO présenté au SICOB 80 (Salon des Industries du Commerce et de l’Organisation du Bureau) : IPA (Roland Billon, Alain Pierson, Jacques Zoller).
En parallèle participation à l’élaboration d’un langage informatique propre à la description architecturale « Arlang » développé par Jacques Autran, Jean-Louis Loisy, Marius Frégier, Miguel Rodriguez.
De 1980 à 1999 les réflexions menées à l’issue des travaux de recherche réalisés durant la décennie des années 70, nous ont amené à approfondir, en partenariat avec Paul Quintrand, deux axes de recherche dans le domaine des technologies numériques appliquées à la modélisation en architecture :
– l’utilisation de l’intelligence artificielle alors naissante,
– l’utilisation de la synthèse d’image dans les domaines de l’architecture et de l’urbanisme.
Ces travaux se sont concrétisés par la réalisation du système Remus (représentation de la morphologie urbaine), et par la participation à plusieurs travaux de recherche dont, le système co-expert de CAO « Tecton » (Paul Quintrand, Stéphane Hanrot) intégrant le savoir architectural.
Cette activité de recherche a permis la création d’enseignements spécialisés dans la modélisation et la représentation en architecture, à l’EAML, mais aussi au travers de partenariats avec l’université (St Jérôme et Luminy).
Durant cette période la mise en place de coopérations internationales en particulier avec la Faculté d’Architecture de l’Université des Sciences Techniques et Économiques de Budapest et le GIDCAD (Grupo de Investigation y Docencia en ComputacionAplicade al Diseno) à la Faculté d’Architecture de l’Université de Belgrano à
Buenos-Aires a contribué au rayonnement de l’école.
En 1983 l’exposition au musée d’histoire de la ville de Marseille « L’image en Architecture, les machines à dessiner », a été l’occasion, à la demande du maire (Gaston Deferre), de faire connaître aux marseillais les avancées de la recherche dans le domaine de l’application des techniques numériques à l’architecture à l’EAML ; cette exposition a été ensuite installée à l’hôtel de Sully à Paris, puis à l’École d’Architecture de l’Université Laval à Montréal.
Co-auteur du livre la CAO en Architecture réalisé sous la direction de Paul Quintrand aux éditions Hermès.
De 1999 à 2012 membre du laboratoire ABC, mon travail de recherche à essentiellement porté sur l’application des méthodes et techniques numériques à la pédagogie en particulier par la création d’une option architecture dans le DESS puis le master CCI (Compétence Complémentaire en Informatique) de la faculté de
sciences de Luminy, ainsi que dans la réalisation en partenariat avec le Conseil Général des Alpes Maritimes de CD-Rom et de bornes interactives dans le domaine de la communication sur le patrimoine architectural et urbain. Ce travail mené dans le cadre de l’enseignement du DESS puis du master CCI comme mise en oeuvre des connaissances acquises, avec l’aide de Didier Dalbera, Isabelle Fasse et Frédérique Bertrand, permettait des coopérations interdisciplinaires au sein de l’école avec J.L Bonillo et Stéphane Hanrot ainsi qu’avec des partenaires extérieurs universitaires ou industriels.
Quels est votre meilleur souvenir et/ou la personne qui vous a le plus marqué à l’ensa•m en tant qu’enseignant et chercheur ?
La personne qui m’a le plus marqué est certainement Paul Quintrand, par la richesse des échanges que nous avons eu, par la rigueur de sa pensée et de son action, par l’ouverture dont il a su témoigner pour mettre en oeuvre un enseignement pluri-disciplinaire.
Il fut avec d’autres en France (J.P. Penaut, P. Boudon, …) celui qui permit de mettre en place de façon pérenne, une recherche
dans les écoles d’architecture.
Mais cette dynamique n’a pu se concrétiser et perdurer que par l’investissement de tous ceux qui ont décidé de s’investir à plein temps comme enseignant-chercheur et par ceux qui aujourd’hui encore font ce choix.
Mais se limiter à une personne est par trop restrictif, il faudrait citer ici tous les enseignants qui ont participé à ma découverte de la richesse du domaine architectural, les étudiants qui m’ont permis de faire évoluer l’enseignement par leurs discussions constructives en marge des cours, le personnel administratif sans lequel rien ne serait possible.
Je garde de ces années durant lesquelles se complétaient enseignement, recherche, formation continue, partenariats locaux, nationaux et internationaux, un souvenir de plénitude des actions menées. En extraire un souvenir particulier, relèverait de l’anecdote et affaiblirait à mes yeux, le vécu de ces quarante années.
Quant au meilleur souvenir, je dirai plutôt que je n’ai aucun mauvais souvenir de cette période de 40 ans passés dans cette école.
Un dernier mot (un conseil, une réflexion) ?
La recherche est un métier, elle ne se limite pas à avoir des idées, mais nécessite de les approfondir, les explorer, les confronter au critiques des autres, de se tenir au courant des travaux réalisés ailleurs, et surtout dans un domaine comme l’architecture, d’avoir une approche pluri-disciplinaire. Enfin elle doit avoir des connexions fortes avec l’enseignement, d’autant plus que les concepts et techniques qu’elle traite seront opérationnels quand les étudiants en cours de cursus seront dans la vie active.
Cela suppose une synergie entre les enseignant-praticiens et les enseignant-chercheurs.
C’est ce que j’ai trouvé à l’EAML comme jeune enseignant, c’est ce qui nous a tous motivé à l’époque pour nous y consacrer à plus que plein temps.
Garder l’esprit d’ouverture, qui fut la richesse de l’école à ses débuts, tant dans les domaines enseignés que dans les enseignants recrutés.
A force d’avoir tous le même regard, on finit par perdre de vue la réalité.